La réforme annoncée de MaPrimeRénov’ marque un tournant qui inquiète fortement les professionnels du bâtiment. Alors que ce dispositif devait constituer le moteur d’une massification des rénovations énergétiques, son recentrage drastique remet en question son efficacité et son équité. Cinov Ingénierie, organisation représentative des bureaux d’études, alerte sur le risque d’un affaiblissement durable de la dynamique en faveur de la rénovation globale. Derrière des arbitrages budgétaires jugés trop restrictifs, ce sont la structuration de la filière, la montée en compétences des acteurs et la confiance des ménages qui sont en jeu. Une réforme perçue comme un coup d’arrêt à une politique pourtant essentielle à l’atteinte des objectifs climatiques.
Cinov alerte sur les dérives d’une réforme trop restrictive
La trajectoire ambitieuse de MaPrimeRénov’ menacée
Le parcours « Rénovation d’ampleur » constituait jusqu’ici le socle du dispositif, permettant aux ménages d’engager des travaux cohérents et performants. Isolation, chauffage, ventilation : en abordant le logement dans sa globalité, il offrait la seule trajectoire capable de répondre aux objectifs climatiques à coût maîtrisé. Mais la fermeture temporaire du guichet à l’été 2025, suivie d’une réouverture limitée à 13 000 dossiers réservés aux ménages très modestes, constitue un signal préoccupant. Cinov dénonce une logique de court terme, dictée par des contraintes budgétaires, qui compromet une dynamique déjà amorcée auprès des particuliers. Parallèlement, le développement du parcours « par gestes », moins exigeant, risque d’enfermer les ménages dans des rénovations partielles et inefficaces à long terme. Sans encadrement technique robuste étude de conception par un bureau d’études ou un architecte, ces démarches fragmentées augmentent les coûts cumulés et retardent l’atteinte de véritables gains énergétiques. Pour les professionnels, c’est une perte de cohérence et un frein à la massification.
Réhabiliter l’expertise et renforcer la confiance des acteurs
L’autre sujet majeur concerne la qualité des audits énergétiques, essentielle pour orienter les choix de travaux. Cinov déplore l’ouverture à des profils non qualifiés et l’imposition de la méthode 3CL DPE, jugée inadaptée. Résultat : les audits, censés être un outil de conception, se transforment en évaluations normatives déconnectées des réalités techniques. Cela fragilise le rôle des ingénieurs et thermiciens, prescripteurs de solutions auprès des artisans et des TPE. L’organisation plaide pour un retour à des audits assurables par la décennale, au même titre qu’une mission de conception, garantissant ainsi qualité et responsabilité. Dans un contexte de contraction budgétaire, Cinov insiste : l’avenir de la rénovation ne peut reposer uniquement sur les aides publiques. Il faudra construire un cadre stable et prévisible, favorisant la montée en compétences, l’innovation et une équité d’accès pour toutes les catégories de ménages, y compris les classes moyennes aujourd’hui exclues. La réussite passera par une ingénierie de qualité et un pilotage clair, capable de rétablir la confiance entre pouvoirs publics, professionnels et usagers.